lundi 29 juin 2009

Sonic Youth - The Eternal


Voilà neuf ans que j’attendais un album de Sonic Youth digne de ce nom. Car depuis l’époustouflant NYC Ghosts & Flowers sorti en 2000, trois albums « moyens » s’étaient succédé : si Murray Street (2002) pouvait encore faire illusion sur quelques titres, je peine à me souvenir du moindre morceau de Sonic Nurse (2004) ou même de Rather Ripped (2006). Ces deux CD hibernent bien sagement sur mon étagère depuis lors.

2009 : changement de label pour les quinquagénaires (qui passent de Geffen à Matador) qui en profitent pour revenir à des compositions moins convenues. Aucun doute sur Sacred Trickster, plage d’ouverture sur laquelle Kim Gordon se rappelle le bon vieux temps où elle s’égosillait, les cheveux au vent. Suit Anti-Orgasm avec son riff de guitare d’intro à la Mudhoney : Kim et Thurston s’y donnent la réplique sur les couplets, tandis que sur le refrain, c’est Kim qui reprend les commandes et gémit comme une bête empalée sous les assauts d’une batterie en pleine érection.

Tiens, je pense à Fernande…

Anti-Orgasm s’achève sur une lente descente, Kim la tête enfoncée dans l’oreiller, à la fois magnifique et ruisselante.

Sur Leaky Lifeboat, on lève le pied pendant trois minutes, le temps de laisser passer quelques lalalalas sur un refrain et de bien belles harmoniques.

Antenna s’ouvre sur une super rythmique saccadée… mais s’emmêle un peu les pinceaux quand Thurston se met à chanter. C’est peut-être le défaut principal de Sonic Youth sur ces 10 dernières années : avoir accordé trop de place au chant lisse d’un Thurston Moore qui n’est finalement jamais aussi bon que quand il gueule un bon coup. Sur bientôt trente ans de carrière, je dois avouer que je commence à avoir fait le tour de sa palette vocale. Ceci dit, Antenna enchaîne sur de superbes montées de guitares qui se marient à merveille à cette batterie tranchante.

Tiens, pas encore parlé de Lee Ranaldo ? C’est sur What We Know qu’il ramène enfin sa fraise. Rien à dire niveau vocal : c’est quand Lee s’empare du micro que je frissonne vraiment. Il a ce grain dans la voix qui me fait frémir et surtout, cette capacité à toujours la poser juste où il faut quand les guitares se veulent plus bruyantes. Du tout grand art. Allez, on se la remet !

Calming The Snake voit Kim Gordon revenir à la charge dans une forme qui nous rappelle l’époque de Goo. Elle carbure à quoi, la Kim ? Il y avait longtemps qu’on ne l’avait plus vue aussi épanouie. Tandis que sur l’intro de Poison Arrow, Thurston Moore s’enfonce un peu plus dans ses mésaventures pop, il redresse la barre un peu plus loin en matraquant la guitare, sans pour autant sauver le morceau. Le maillon faible de l’album.

Sur Malibu Gas Station, on replonge carrément en pleine époque Dirty : batterie punk, guitares nerveuses et Kim qui chante comme si elle avait 14 ans. C’est ce que j’aime le plus chez elle : sa façon de passer d’un registre digne de la petite Nancy Sinatra qui chantait These Boots à un rugissement de bête assoiffée de sang. C’est pour ça que j’étais amoureux d’elle à 16 ans.

Thunderclap For Bobby Pyn est un autre morceau en demi-teinte, trop pop’n’roll à mon goût (il y a même un solo de guitare !!!), une tentative avortée de ratisser large. C’est typiquement pour ce genre de chansons que je n’ai jamais accroché aux deux albums précédents. On aurait pu craindre la même dérive sur No Way, qui tire toutefois son épingle du jeu grâce à un riff de guitare diaboliquement efficace et à un Steve Shelley décidément déchaîné derrière ses fûts.

Walking Blue est le second (et donc dernier) titre de cet album qui offre la possibilité à Lee Ranaldo de poser sa voix sombre et délicate, toujours à cheval entre le blues et le spoken word. C’est carrément géant, un peu planant, un peu mélancolique. Comme à chaque fois avec Lee, survient cette impression d’un garçon de 10 ans qui s’amuse à chanter avec la voix d’un mec de 50 balais. L’envolée de guitares est somptueuse et vient ponctuer d’une touche oppressante un titre jusque là assez léger. Ça aurait dû être LA perle de l’album mais c’était sans compter sur ce qui suit…

Massage The History fait office d’épilogue pour The Eternal. Et quel épilogue ! Quelques accords de guitare acoustique pour commencer, la guitare électrique qui vient pleurer au-dessus comme un chant de baleine et puis… et puis… et puis c’est Kim qui vient me susurrer au creux de l’oreille de sa voix cassée quelques phrases à peine audibles (on pense à la petite Charlotte Gainsbourg sur Lemon Incest) avant de briser la monotonie avec un orgastique « You’re so close to me » au son duquel on entend les manches de guitares se dresser à l’unisson. Place alors à une longue digression instrumentale (comme elles m’avaient manqué celles-là !) qui me caresse dans le sens du poil, comme si avec Sonic Youth, on plaçait les préliminaires au milieu. C’est finalement Kim qui reprend les choses en main, grogne tendrement et décide de terminer sa petite affaire en douceur, les cheveux blonds collés sur un front en sueur. Elle se frotte, ronronne, fait le gros dos, et respire de plus en plus fort. Elle gémit une dernière fois avant de se raidir en un ultime sursaut.

Glps

C’est fini. Je suis où, moi ? Et pourquoi je suis à poil ? Et ça sent le fauve ici. Kiiiiiim ?

A regarder : la vidéo de Sacred Trickster





Le lien :

www.sonicyouth.com

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire