lundi 31 mars 2008

You don't know - Ninja Cuts

Ben si justement...

Quand la crise du disque a commencé il y a environ cinq ans, qui aurait parié le moindre sesterce sur la survie du label Ninja Tune, avec sa grosse quinzaine de sorties annuelles ? Moi, si j'avais eu un sesterce. Et d'autres passionnés du bel objet. Là où certains se demandent toujours pourquoi les chiffres ne remontent pas malgré la mise à la porte des groupes les moins vendeurs, Ninja Tune a développé la stratégie inverse : se concentrer sur la recherche du talent rare, proposer des albums de qualité et soigner le produit final. Pour appâter le connaisseur, on n'hésite plus à sortir des pièces exclusives en vinyle, un DVD assorti d'une paire de lunettes 3D du plus bel effet ou mieux, à liquider une partie des stocks à l'occasion de concours réguliers qui m'ont permis de recevoir quelques vinyles dédicacés que je montre fièrement au passant indifférent.

- T'as vu mon EP dédicacé par Sixtoo ? Dé-di-ca-cé par Six-too, j'te dis !
- Et mon cul, tu l'as vu ?

Connaissent rien à rien, ces passants...
Pour appuyer son approche, le label britannique sort de temps à autre une compile magistrale, sorte de catalogue de ce qui se fait de mieux dans la maison. Chez Ninja Tune, on a élevé la compile au rang d'objet incontournable, bourré d'inédits, de remixes, de faces B, de feat's et de beats. [ça, c'est pour montrer que je parle plusieurs langues]

Ce You don't know s'inscrit donc dans la lignée de Xen Cuts, grosse machine de guerre sortie en 2000 et par laquelle j'avais découvert, ô suprise, que la musique électronique n'était pas que de la merde prémâchée pour se tuer sur une route mal éclairée le samedi soir et faire la Une de la gazette locale le lundi matin. En huit années, la formule n'a pas pris une ride : packaging impeccable, livret truffé d'infos sur chaque titre et surtout un triple CD qui part dans tous les sens. Si les poids lourds de la maison sont évidemment à l'affiche (Amon Tobin, Coldcut, The Herbaliser, The Cinematic Orchestra, Roots Manuva, Jaga, etc.), tout l'intérêt d'une telle compile est à chercher en deuxième ligne, chez ces diamants bruts dont le nom me semblait familier, mais auxquels j'associais une idée très approximative. Ghislain Poirier (remixé par Modeselektor en plage d'ouverture, quelle bombe!), Daedalus, The Heavy, Yppah, One Self, Loka, Pest, Ammoncontact sont autant de découvertes spectaculaires.
Par ailleurs, la comparaison avec la cuvée 2000 permet de mesurer le chemin parcouru depuis lors et surtout l'intelligente diversification des styles ici représentés. L'electro, le hip hop, l'acid jazz, la drum'n'bass sont toujours de la fête. Mais Ninja Tune, c'est désormais aussi du rock (Pop Levi), de la chanson (Fink), du blues (John Matthias).

C'est vrai que j'ai souvent défendu l'achat impulsif (la belle pochette, le nom de groupe marrant, le titre d'album biscornu). You don't know, c'est tout le contraire. C'est même l'achat le plus rationnel qu'on puisse faire ce mois-ci. Sur la liste des courses, il faut le placer entre le pain et le café. On n'aurait pas idée d'aller à un rendez-vous galant sans s'être brossé les dents. On n'aurait pas idée non plus d'aborder l'été 2008 sans avoir cette compile à portée de main.

Le site officiel : http://www.ninjatune.net/

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