dimanche 26 décembre 2010

Goodbye 2010 and see you in Hell


Voilà, nous y sommes. La décennie touche (enfin) à son terme. Comme chaque année, je te gratifie d’une petite compile en guise de remerciement pour ton indulgence à lire des chroniques souvent bancales, pas toujours inspirées faute de temps (mais je m’accroche, je m’accroche) et parfois même dignes d’un séjour en centre thérapeutique (la série Bowinage est presque terminée, la fin du calvaire approche). 

Petite précision suite à un malentendu avec quelques fidèles lecteurs l’an dernier : ma compile n’est PAS un best of de l’année écoulée. Des tas d’autres sites et blogs font ça beaucoup mieux que moi. Pas la peine dès lors de me dire que j’ai oublié tel ou tel groupe à la mode. Ce que je te propose, c’est simplement un condensé purement subjectif de ce que j’ai le plus écouté en 2010. Pour cette édition, j’ai pris un soin tout particulier à éliminer les trois quarts de ce qui encombre mon disque dur, à savoir du doom pachydermique impénétrable et du vilain black metal absolument abominable. J’ai donc fait l’effort de condenser ce qui me paraissait le plus écoutable, sous la forme de 17 coups de cœur, en prenant soin de dépasser les 80 minutes, juste pour te faire chier quand même un peu si tu veux graver ça sur un CD. Il y en a à peu près pour tous les goûts cette année : pop, rock, electro, soul et quand même une petite touche de métal. 

Et comme d’hab, je me suis échiné à te fournir un bel emballage : artwork 100% maison (je reconnais avoir recouru aux banques d’images les années précédentes) qui m’a occupé de longues soirées. 

Trèves de blabla, passons à l’action. Et je le répète : si un seul titre de cette compile retient ton attention, alors j’estime avoir bien fait mon boulot.

Commençons par l'artwork...



... et maintenant, la playlist explicative :

1. Lilium – Her Man Has Run (France, USA)

Le choix des titres terminé, il fallait en déterminer l’ordre. L’exercice a été un vrai casse-tête. J’ai finalement opté pour ce titre de Lilium, afin d’assurer un décollage en douceur. La rondeur de cette composition de Pascal Humbert, bassiste de 16Horsepower et Woven Hand, n’est peut-être pas la mise en bouche à laquelle tu t’attendais. Et pourtant, avoue que cette chanson est magnifique.


2. Boris & Ian Astbury – Teeth and Claws (Japon, UK)

C’est ici que nous entrons dans le vif du sujet, avec un exemple de la chanson pop-rock parfaite. Riff brûlant, voix qui en a vu d’autres et refrain qui colle au cul. Les Japonais de Boris ont trouvé chez le chanteur de The Cult la signature vocale qui leur avait souvent manqué.



3. Lumerians – Burning Mirrors (USA) 

Sans doute LA claque de l’année. On savait que les groupes de revival psyché rock puisaient allègrement dans le répertoire des seventies. Les Lumerians remontent le temps encore un peu plus loin et vont carrément se ressourcer aux sons de la pop sixties avec, je trouve, une petite touche yéyé du meilleur effet.



4. Indian Jewelry – Excessive Moonlight (USA

Pop sexy et electro éthérée au menu de ce titre hautement hypnotique des Texans d’Indian Jewelry qui ne lésinent pas sur les quantités quand il s’agit d’injecter à leur musique une lourde dose de psychotropes.



5. Chrome Hoof – Vapourise (UK) 

Le dernier album de Chrome Hoof est un tsunami de rock-metal-disco-funk absolument indescriptible. Le comble, c’est que la meilleure plage reste à mon goût cette petite pépite électro qui alarme des armées de fourmis le long de mes jambes poilues, un titre qui tranche franchement avec le reste du disque. Pour la petite histoire, une version « vocale » est sortie en single.



6. Maserati – We got the system to fight the system (USA

Encore un titre instrumental sur cette compile. Cette fois, on navigue dans les eaux déchaînées d’un post-rock survitaminé. Remuant et dansant à la fois.



7. Sungrazer – Zero Zero (NL) 

Le premier EP de ces trois Hollandais sera certainement passé complètement inaperçu cette année. C’est pourtant un sacré concentré de stoner rock qui a le mérite de ne pas basculer dans le bourrin. 




8. Tunng – Don’t look down or back (UK

La bande d’hippies chevelus et poilus accouche sur son quatrième album de cet hymne naïf comme tout, sorte de transcription gospell de la méthode Coué.



9. Sharon Jones & The Dap Kings – Mamma don’t like my man (USA

Nouvelle diva de la soul depuis une dizaine d’années, Sharon Jones pond ici une splendide complainte dans la plus grande tradition du blues féminin d’outre-Atlantique. La chanson la plus roots de l’année.



10. Jamie Lidell – The Ring (UK) 

Malgré un nouvel album plus que discutable, Jamie Lidell parvient à placer sur ma compile ce single au beat totalement tordu. C’est justement lorsqu’il évite les grands standards de la pop FM que Lidell offre à sa voix l’écrin insolite qu’elle mérite.



11. Aucan – Rooko (ITA) 

Extrait de l’EP DNA, ce titre montre à quel point les Italiens d’Aucan se sont affranchis de l’étiquette des Battles transalpins. Après les arpèges de guitare, le break electro est tombé comme une stalactite sur mes oreilles encore toutes meurtries.



12. Keiki – Lottie Johl (BE) 

Cocorico ! Le duo bruxellois de « satanic pop » embrase mes sens avec cette méchante rengaine imparable. Toute ressemblance avec PJ Harvey ne serait que purement fortuite.


Sur MySpace

13. Cathedral – Ghost Galleon (UK) 

J’ai longtemps hésité à mettre ce titre sur la compile. Un peu lourd, un peu rêche, un peu brut de décoffrage et puis cette violente descente du coude où les guitares vomissent leur apathie. Et puis merde ! J’ai craqué. 



14. The Progerians – The Value of my Star Wars Figures (BE) 

Deuxième cocorico! Je n’ai même pas chroniqué les Progerians cette année, parce que ce disque n’a pas été commercialise à ma connaissance. C’est le bassiste qui me l’a filé à la sortie d’un concert, je l’ai immédiatement mis dans l’autoradio et ce déluge punk à mettre quelque part entre les Stooges, les Ramones et At The Drive-In m’a aussitôt cloué au siège du bolide allemand. A suivre.



15. Scorn – Taking Someones Eyes Out (UK

Je suis le premier à l’admettre : ce titre de Scorn est sans conteste le plus hermétique de la compile. Il se fait que je me suis pris au jeu et que j’y ai complètement accroché. Alors c’était difficile de ne pas l’évoquer au moment de dresser le bilan.



16. The High Confessions – Dead Tenements (USA-UK) 

On arrive presque au bout de l’exercice, mais on n’y est pas encore vraiment. Il faudra d’abord avaler les 11 minutes étouffantes de cet exercice de style, entre punk ralenti et spoken word.



17. Russian Circles – Malko (USA)

Je n’ai pas vérifié, mais je pense que cet album est sorti en 2009. Tant pis, il a quand même rythmé mon année. Et en guise de petit coup de pied au cul pour sortir de la torpeur des Hautes Confessions, je trouvais que ce titre méritait son poids en cacahuètes. A l’année prochaine…




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samedi 18 décembre 2010

Bowinage - épisode 4 sur 5 : Always Crashing in The Same Car (1977)

Bowinage : une reconstitution historique inédite d'un pan totalement oublié de la biographie de David Bowie. Un travail documentaire rigoureux pour rétablir la vérité sur l'influence des terrils du Borinage sur l'oeuvre du Thin White Duke.

Eté 1976: l’Europe est assommée par une vague de chaleur sans précédent. C’est également l’été qui voit mes parents s’unir pour la vie. Cérémonie modeste, certes, mais ma maman tenait absolument à y inviter David Bowie, « ce petit charmeur aux grandes dents » qui l’avait tant intriguée. C’est l’époque où la rock star commence à s’aventurer à Berlin, bras dessus, bras dessous avec Iggy Pop et Lou Reed. Contre toute attente, c’est avec une autre étoile montante de la musique populaire qu’il se rend aux épousailles. Bien connu des kermesses et autres fêtes au boudin de la région, c’est Claude Barzotti qui l’accompagne. Bowie avait besoin d’un lift et c’est Eddie Barclay qui lui avait présenté ce jeune fils d’immigré italien « dont le talent n’a d’égal que l’éclat de ses boucles couleur corbeau ».

Musicalement, les deux chanteurs n’ont que très peu d’atomes crochus. Ils trouvent toutefois un terrain d’entente dans le Cabernet Sauvignon bulgare qui arrose le repas et les Mon Chéri tombés à point au moment du pousse-café. Pour une fois, la chanson Always Crashing In The Same Car, sortie en 1977 sur l’album Low, ne fait pas directement référence à l’un ou l’autre membre de ma famille. Pas directement, mais un peu quand même, puisque ce titre relate comment, après avoir redéposé Bowie à la gare de Jemappes après la soirée, Barzotti, complètement bourré, alla encastrer son Opel Manta flambant neuve dans l’un des feux des Quatre Pavés de Quaregnon. C’est de cet accident que Claude conserva les graves séquelles cérébrales qui le mèneront en 1981 à commettre l’album Madame.






La première pochette du 45 tours "Le Rital",
retirée du commerce après 2 semaines suite 
au procès qui opposa Barzotti à EMI.

A regarder : Always Crashing in The Same Car (live)

mardi 14 décembre 2010

Maserati : Pyramid of the Sun

Après Chrome Hoof, Cave, Aucan ou Higamos Hogamos, Maserati constitue une nouvelle surprise venue tout droit d’une autre galaxie. Enchaînant les plages instrumentales comme d’autres leurs pneus d’hiver, ce combo qui gravite autour d’un membre* de !!! rafle la mise avec une recette bourrée d’anti-oxydants: nappes synthétiques, rivières de guitares, beats mécaniques contribuent à épaissir une mayonnaise qui, ô surprise, ne tache pas. Les références à Pink Floyd sont à peine voilées (ne serait-ce que le titre de l’album) et la pochette ne laisse plâner aucun doute sur la nature intrinsèquement psychédélique d’un menu 8 services décliné en autant d’exemples que le rock peut aussi être une musique dansante.

A l’écoute de ce nouvel album de Maserati, je me plais à redécouvrir un cocktail profondément hybride, qui puise ses racines dans des terres rock, electro et funk. Un album ambitieux qui, dans son esprit plus que dans sa forme finale, me rappelle par moments les émotions ressenties à l’écoute des premiers disques de "rinôcérôse", il y a plus de 10 ans déjà. 

En cette période de froid sibérien, quand la tentation est immense de s’enfermer, à la lueur d’une bougie d’Amnesty International, dans une suicidaire écoute répétitive de l’intégrale de Nick Drake, Pyramid of The Sun pourrait bien ramener un peu de chaleur naturelle dans nos foyers. Et retarder ainsi un peu plus le jour où Gazprom dominera officiellement le monde. Conclusion hâtive (mais peut-être pas) : et si l’écoute de l’album de Maserati était tout simplement un geste civique ?

* De l’intérêt d’une petite vérification sur Google avant de publier: Jerry Fuchs, batteur de !!! et Maserati est décédé l’an dernier dans un sordide accident d’ascenseur. Il n’en demeure qu’il avait déjà enregistré toutes ses parties de batterie avant l’enregistrement de ce disque.

A regarder : Pyramid of the Sun (live)



vendredi 3 décembre 2010

Bowinage - épisode 3 sur 5 : Station To Station (1976)

Bowinage : une reconstitution historique inédite d'un pan totalement oublié de la biographie de David Bowie. Un travail documentaire rigoureux pour rétablir la vérité sur l'influence des terrils du Borinage sur l'oeuvre du Thin White Duke.

En 1975, ma mère n’a toujours pas la moindre idée de qui était ce bellâtre qui l’avait abordée sur la berge quelques années plus tôt. Pire, elle s’en souvient à peine. Dans le Borinage, le choc pétrolier se fait ressentir plus qu’ailleurs. Et dans sa petite bicoque de fille de mineur, cette splendide demoiselle de 20 printemps n’a toujours pas les moyens de s’offrir le tourne-disque qui lui ouvrirait les portes de la musique pop anglaise. Pour occuper ses soirées, elle traîne donc dans les cabarets fréquentés par des mineurs ivres morts qui dépensent leur paie pour oublier la couleur du trou. 

Bowie en gare de Flénu
De l’autre côté de la Manche, Bowie poursuit son bonhomme de chemin. Les années de galère sont maintenant derrière lui et il peut commencer à tapisser ses murs de disques d’or, même si le succès commercial n’est pas toujours à la hauteur des critiques élogieuses qu’il suscite. En tournée continentale pour défendre l’album Young Americans, il décide de faire un crochet rapide par le Borinage et croit dur comme fer qu’il pourra cette fois revoir sa bien-aimée. Cette nouvelle tentative s’avère fructueuse puisque, sur le quai de la gare de Flénu, il tombe nez à nez avec la petite rouquine, visiblement seule. Après quelques minutes d’une conversation bancale, la mémoire de ma future maman se rafraîchit et les deux tourtereaux commencent à se raconter leurs vies respectives. Bowie peut difficilement cacher sa frustration : comment est-il possible que cette jeune et belle femme n’ait jamais entendu parler de lui ? La discussion se rompt subitement lorsqu’entre en gare le train omnibus en provenance de Bruxelles. Du deuxième wagon descend un jeune homme en uniforme, mince, pâle au regard droit et portant une petite mallette. Bowie voit son interlocutrice se jeter littéralement dans les bras de ce militaire en permission, qui deviendra plus tard mon père. 

Vexé, l’artiste tourne les talons mais ma mère l’attrape par l’épaule et lui propose de se joindre à eux pour la soirée. L’un de ses cabarets préférés a été récemment ravagé par un terrible incendie et mon futur papa participe ce soir-là à un concours de fléchettes, dont les bénéfices serviront à reconstruire le bistrot. Flatté, Bowie passera ainsi la soirée incognito dans la fumée et les effluves de bière d’un cabaret borain, au milieu des joueurs de manille et des crosseurs en plaine. Mais la joie et la bonne humeur de l’instant ne sont rien en comparaison de la douleur qui le mange de l’intérieur. Le lendemain aux aurores, il prend le train pour Paris et rejoint ses musiciens pour la suite de la tournée. Pendant son voyage, il écrit les premières lignes de l’album Station To Station: « The return of the Thin White Duke / Throwing darts in lovers’ eyes ».

A regarder : Station To Station (live)



("It's not the side-effect of the cocaine"? Bof...)