jeudi 21 juin 2007

Tomahawk - Anonymous

American Beauty

Troisième album pour ce énième projet de Mike Patton, ex-gourou de Faith No More et désormais leader hyperactif de Fantômas, Mr. Bungle, Peeping Tom... la liste est longue. Après avoir signé l'impeccable Mit Gas en 2003, qui attaquait de face les codes du rock musclé en les confrontant à des structures tirées du jazz ou du blues, le trio a décidé cette fois de retourner aux racines profondes de la musique américaine. Point d'Elvis, de Johnny Cash ou de John Coltrane. On remonte ici carrément à la musique des Amérindiens.

La démarche part d'une constatation déplorable : en écumant les bacs des disquaires, le guitariste fou Duane Denison (de feu The Jesus Lizard) s'indigne de ne trouver dans la catégorie Native Americans que de tristes pantalonades new age censées donner bonne conscience au pionnier qui sommeille au fond de chaque ricain. On se souvient de Wamblee et du tube d'un jour Anitouni tout en plumes et en couleurs. Vous voyez le tableau...

L'ami Duane entreprend donc des recherches plus approfondies et exhume une bonne douzaine de chants traditionnels indiens qui correspondent plus à son style ravageur: agressifs, corrosifs et pleins de fureur. Accompagné du batteur John Stanier (Helmet, Battles), il réinterprète ces titres sur les cordes de ses Gibson déglinguées. Mike Patton viendra ensuite y ajouter voix et samples.

Le résultat est tout simplement décoiffant. Bien moins accessible que les deux essais précédents, Anonymous est un disque unique qui déstabilise par ses accents tribaux, ses rythmiques lourdes et ses onomatopées hachées. Toute sa force réside dans la capacité de Tomahawk à mettre au jour le côté intrinsèquement rock'n'roll de la musique indienne. Intéressant pour le musicologue, cet exercice n'en demeure pas moins agréable à l'oreille avec des titres comme Mescal Rite ou Song Of Victory qui marient traditions folk et puissance rock. De son côté, la légèreté de la mélodie d'Antelope Ceremony rappelle le dernier album de Deerhoof.

Assez réussi pour forcer le respect mais parfois trop sanguin pour être écouté d'une traite, ce troisième album explosif de Tomahawk marquera l'histoire de par son statut d'objet indéfinissable, inclassable et totalement à contre-courant.


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