mardi 6 mai 2008

El Dinah – Esperanto


2008 sera-t-elle l’année du retour de la Wallonie qui gagne, après, disons, 35 années d’un long déclin post-industriel? Les signes de cette réussite ne manquent pas, nous dit-on. Il y a Google et Microsoft qui ouvrent des succursales dans la région de Mons, l’aéroport de Charleroi qui inaugure un nouveau terminal, Arcelor Mittal qui revient polluer le beau ciel mosan. Et puis surtout, il y a le Standard de Liège qui est champion de Belgique de football. Le Standard, c’est le symbole de la Wallonie à lui tout seul : 25 années d’humiliation, à louper des penalties dans les arrêts de jeu, à ramasser des casquettes en coupe d’Europe, à dépenser des fortunes pour offrir une retraite dorée à des joueurs à la limite de la validité. Pendant 25 ans, le Standard a été le Jean-Claude Dusse de la Belgique : toujours sur le point de conclure, avant d'accumuler les vestes. Et puis, la direction de l’équipe décide soudain de se séparer de ses stars quadragénaires, d’investir dans la formation des jeunes, de créer un esprit de groupe. Deux années plus tard, la démarche porte déjà ses fruits : le Standard est champion et on ne parle plus que de ça, de Liège à Charleroi, de Tournai à Arlon.

Pourquoi je te parle de tout ça ? Parce que le rock wallon, c’est un peu à l’image du Standard : une poignée de valeurs sûres mais épuisées qui, à quelques exceptions près, piétinent, produisent un jeu sans grande imagination, tirent régulièrement sur le poteau, vont chercher le nul en déplacement. Derrière ce onze de base, il y a tout une école de jeunes qui, à défaut de faire la une du supplément sportif du dimanche, cherche de nouvelles combinaisons à l’entraînement, se défonce chaque week-end sur les terrains de division provinciale et espère ainsi pouvoir un jour obtenir, non pas un ticket pour la Ligue des Champions, mais simplement le droit de démontrer l’étendue de ses talents dans des conditions dignes de ce nom. Dans le milieu du foot, on appelle cette catégorie de joueurs « le noyau B », formule extrêmement péjorative qui désigne ceux qui attendent patiemment de pouvoir fouler un gazon laissé indemne par les taupes du voisin.

Dans le noyau B du rock wallon, je t’ai déjà parlé de Frank Shinobi, du très respectable label liégeois Honest House. Dans la même maison nous arrive maintenant El Dinah, autre groupe du sud du pays qui mérite lui aussi toute ton attention. Fraîchement débarqué dans mes oreilles, Esperanto, leur premier EP, est un concentré de rock sulfureux, hargneux et sans tabou. Les six morceaux de cette première fournée alternent envolées guitaristiques, chant primal et ruptures de rythme orchestrées par une batterie qui ne recule devant aucun défi. Tout comme pour leurs cousins de Frank Shinobi, on cite en références 31knots, Shellac ou At The Drive-In. J’ajouterais dans la liste mes chouchous de Pterodactyl. A une nuance près : le saupoudrage savant de quelques gimmicks heavy metal dans le jeu de guitare, histoire de conférer à l’ensemble un peu plus de poids. Il y a même quelque chose de Tool dans le final d’un titre comme Riot. En plus, il paraît que, sur scène, ils n’ont rien à envier au noyau A. Ce premier EP est en tout cas une fameuse réussite. Vivement l'album...

Voilà donc le mal wallon : le potentiel pour devenir une région qui gagne à être connue est là. Il suffit primo de le reconnaître, secundo de le promouvoir, tertio de lui donner sa chance. Si au passage on pouvait également envoyer certains pique-assiettes à la retraite, ça ne ferait de tort à personne. Je n’aurais jamais cru tenir un jour de tel propos : suivez l’exemple du Standard, les gars. Suivez l'exemple du Standard.

Les liens intéressants:

El Dinah sur Myspace : http://www.myspace.com/eldinah
Pour commander le disque : http://www.honesthouse.be/index.php?honest-shopping

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