dimanche 3 janvier 2010

Pelican – What We All Come To Need / L’art de fermer sa gueule


Depuis une dizaine d’années, Pelican excelle dans un style qui pourrait évoquer l’image d’un mammouth sur des patins à glace. Rock dur, gras, adipeux mais strictement instrumental et finalement… plutôt musical. Le style qui a fait des émules a été qualifié de post-core ou post-hardcore, histoire de bien préciser qu’il s’agit ici d’une version body-buildée du post-rock qu’on connaissait déjà avec Godspeed You! Black Emperor, Explosions In The Sky, Mogwai ou Red Sparowes.

Si je devais citer la différence principale entre le post-rock et le post-hardcore, je dirais que là où le premier peut t’emmener dans les airs, le second te collera les deux pieds bien sur terre et t’y enfoncera même de quelques centimètres à gros coups de massue sur le haut du crâne.

Pour autant, la musique d’un groupe comme Pelican reste relativement accessible au commun des mortels, principalement en raison d’un sens de la mélodie indiscutable. Les cardiaques devront juste s’habituer aux gros coups de boutoir de la batterie, puis ça passera comme une lettre à la poste.

What We All Come To Need constitue le quatrième album de Pelican, sorti cette fois sur Southern Lord, autrement dit la maison de quelques extrémistes du gros son qui rend fou comme Sunn O))), Black Cobra ou Earth. Pourtant, la recette n’a pratiquement pas changé. Les premières secondes balaient toute forme de doute possible : le son est reconnaissable entre mille. Au rythme d’arpèges ultra-mélodieux, la sauce s’épaissit voluptueusement avant de cracher ses grumeaux dans des explosions de guitares.

On pourrait reprocher le côté très prévisible des albums de Pelican. D’un disque à l’autre, pas vraiment d’évolution notable, pas de grande surprise, juste des morceaux diablement bien exécutés, respectant à la lettre le cahier des charges. Sur ce dernier opus, je retiendrai en particulier l’intro assassine de The Creeper et le final de Strung Up From The Sky, strident comme s’ils jouaient sur les guitares avec du fil dentaire.

L’album passe, j’aboie une ou deux fois. L’atterrissage est prévu dans 7’29, le temps d’achever Final Breath, le dernier morceau de la bête. Parcours sans faute jusque là, mais sans grand bouleversement non plus. C’est tellement bien foutu que j’ai presque envie de dire que c’est propre, un peu trop bien produit même. Et c’est à ce moment-là que l’accident se produit juste après 22 secondes de cette chanson finale. Une chanson ? Eh oui maman, tu as bien lu : Pelican aura attendu le dernier morceau de son quatrième album pour passer derrière le micro.

Et ça donne quoi ? Franchement… rien. J’ai réécouté l’album une bonne dizaine de fois depuis son acquisition et je l’arrête dès que commence cette respiration ultime. Espérons que ce n’était qu’un coup d’essai et que les quatre poilus tiendront compte d’avis comme le mien. Il ne faudrait pas qu’ils tombent dans le même piège qu’Isis, désormais assez prétentieux pour être persuadé que tout le monde peut se permettre de chanter et qui a signé avec Wavering Radient le seul album que je n’ai pas pu écouter jusqu’au bout en 2009.

Enfin, Rodrigo Beenkens appréciera cette dernière info : le magazine américain Redefine a placé What We All Come To Need à la 19e place du classement des 46 pochettes de disques les plus fantastiques de l’année 2009. Pourquoi pas…

A écouter : Strung Up From The Sky



Les liens :

3 commentaires:

  1. " Isis (...) qui a signé avec Wavering Radient le seul album que je n’ai pas pu écouter jusqu’au bout en 2009."

    Dommage parce que le dernier morceau de l'album, "Threshold of transformation" est, je trouve, un des meilleurs qu'ai pondu Isis dans toute leur carrière.

    RépondreSupprimer
  2. Je viens de l'écouter, merci du tuyau. Effectivement : 9 minutes assez intenses. 3 morceaux du même registre auraient fait un excellent EP. Je me répète, je sais : mais pourquoi cette obsession à faire des albums ?

    RépondreSupprimer